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Marion Coulon
Extrait du Livre de raison
7 février 1949


C'était l'époque à la fois fiévreuse et bénie où la réforme de l'enseignement battait son plein. On était en 1946.
Nous avions lancé avec un plein succès la première "Section familiale" d'Ecoles moyennes et à l'occasion, un problème s'était posé à nous : celui de la formation des régentes ménagères et autres appelées à fonctionner dans ces écoles.
A l'habitude, l'Etat s'était toujours désintéressé du problème. Seule la section française de l'Institut normal ménager de Laeken répondait à une telle nécessité, mais vu les circonstances et son mode d'action, elle était largement insuffisante et littéralement coupée de tout rapport suivi avec l'ensemble de l'Enseignement officiel. A telle enseigne que ses diplômées n'étaient même pas admises directement à donner les petits cours d'économie domestique dans l'Enseignement moyen!
Il fallait faire quelque chose. D'abord, pour prolonger nos Sections familiales par un enseignement secondaire de filles installé dans le même esprit et parallèle aux écoles A2 de garçons. Ensuite, couronner cet enseignement secondaire par une Section normale adéquate et capable de préparer le personnel que nous attendions. C'est à toutes ces nécessités que, personnellement, je pensais souvent à l'époque en passant tous les jours en train devant la belle propriété dite : "Château du Bon Revoir " à Irchonwelz.Sa ferme surtout, avec ses petits arceaux à la mode des constructions rustiques du 18ème siècle m'accrochait les regards.L'ensemble, situé à proximité de l'importante gare d'Ath, ne manquait pas d'allure avec ses beaux arbres, son grand potager, ses pelouses en pente et sa frange d'eau écumeuse. Tout de suite, j'imaginais les ressources qu'on pourrait en tirer le jour où, aménagée par un personnel industrieux et expert, la propriété abriterait une grande école de jeunes filles en pleine prospérité.
Certes, on pouvait regretter que le domaine en question n'ajoutât pas à ses charmes actuels le prestige d'un grand passé. Au lieu d'être, comme c'est si souvent le cas, le vestige un peu mélancolique d'une seigneurie ancienne, c'était, tout prosaïquement, le produit d'un regroupement patient et long, effectué au siècle dernier par un certain Monsieur Williame, notable de l'endroit, dont le beau fils, Monsieur Smits, devait devenir Commissaire d'arrondissement à Ath. De la famille Smits, la propriété et le château qu'on venait de bâtir passèrent ensuite dans les mains de Monsieur Hubert, ancien ministre qui, heureux de les retrouver intacts à son retour de guerre 1914-1918, les baptisa "Bon Revoir".
Toujours est-il que je m'ouvris de ces intentions au Cabinet du Ministre dont le chef était alors Monsieur Cocquyt alors Conseiller à l'Enseignement technique et grand bâtisseur d'écoles techniques de l'Etat. Les services furent alertés, notamment ceux des Travaux publics qui chargèrent de l'achat Monsieur Georges Crombin d'Houtaing, directeur du Comité d'Acquisition de Mons.
Alerté par une dépêche du 16 juillet 1947, Monsieur Crombin procéda immédiatement aux travaux préalables à l'entrée en négociation ainsi qu'à la visite détaillée du domaine afin d'y fixer les valeurs approximatives. Au cours de ses visites, il put apprendre que cette propriété était également convoitée par un établissement concurrent dépendant de l'Enseignement libre. Il se mit en rapport avec l'un des copropriétaires.
Le 5 août 1947, il obtenait de celui-ci un accord pour sa part indivise ( un quart) avec promesse d'intervention auprès de ses copropriétaires, pour le 31 août 1947. A cause de certaines formalités dues à la présence d'enfants mineurs, l'acte ne fut signé que le 26 octobre 1947.
Ici, je passe la parole à Monsieur Crombin: "Cet acte passé devant M. Georges Crombin, Directeur de l'Enregistrement et des Domaines, Président du Comité d'Acquisition d'immeubles pour compte de l'Etat à Mons, porte:
Vente par Monsieur Joseph Hubert, Candidat-Notaire demeurant à Auderghem, Avenue de Blankedelle n°38, à l'Etat Belge pour lequel accepte Monsieur Crombin, des biens ci-après désignés lui appartenant pour lui avoir été attribués dans un acte de partage intervenu avec ses soeurs et neveux en présence de Monsieur le Juge de Paix de Lessines et réalisé le 26 septembre 1947 par acte de Maître Cayphas, notaire à Lessines.
(...)
L'Etat belge est ainsi devenu propritéaire de l'ensemble du Domaine d'Irchonwelz comportant treize hectares quatre-vingts ares pour le prix global de deux millions sept cent trente-deux mille cent quatre-vingt-six francs.
(...)

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Marion Coulon

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