THOMAS TALLIS

entre 1505 et 1510 mort le 23 novembre 1585,  à Greenwich, London

 

Spem in alium

 

 

Le motet Spem in alium pour quarante voix réelles, qui fut composé pour le quarantième anniversaire de la reine Elisabeth I.

 

 

On peut considérer Spem in alium non seulement comme la plus éclatante réussite de la carrière de Thomas Tallis, mais également comme l’une des plus belles compositions musicales de tous les temps. Écrit pour 40 voix indépendantes, ce monument majestueux développe ses 49 longues en exploitant avec imagination et créativité les ressources d’une vaste palette musicale.

Une longue

Terme emprunté à la métrique de l'antiquité, et représentant ordinairement le double de la brève. Les métriciens l'indiquent par un trait allongé —. Dans la notation proportionnelle, à partir du XIIe siècle, figure munie d'une queue, tenant le milieu de note en forme d'une carrée entre la maxime et la brève et valant, sous le mode parfait, trois brèves, et sous le mode imparfait, deux. Elle avait disparu de l'usage à la fin du XVIIe s. et Brossard (1703) entendait par Longue toute note placée au temps fort de la mesure ou prolongée par un point, une syncope ou un agrément.

Tallis dispose ses chanteurs en groupes de huit chœurs à cinq voix (soprano, alto, ténor, baryton et basse) et il semble probable qu’il voulait les disposer en fer à cheval. La pièce commence avec une seule voix du premier chœur ; les autres voix la rejoignent progressivement en imitation puis, tandis que les premières voix s’arrêtent, le son évolue le long de la ligne du premier chœur jusqu’au huitième. Pendant la quarantième brève, les quarante voix font leur entrée simultanément pendant quelques mesures, puis le processus s’inverse lorsque le son repasse du huitième chœur au premier. Après un autre bref tutti (tous, tous ensemble), les chœurs chantent en groupes de deux, projetant le son pour traverser l’espace qui les sépare, jusqu’à ce que les voix finissent par se rejoindre dans une splendide apothéose.

Il est clair que Spem in alium est un morceau de circonstance bien qu’il repose sur un texte liturgique, les répons des matines dominicales pendant la lecture de l’histoire de Judith. Diverses théories ont tenté d’élucider l’occasion de la production de Spem in alium ainsi que la raison d’être du nombre de voix. La suggestion de Paul Doe selon laquelle le premier concert aurait eu lieu en 1573, quarantième année de la vie d’Elisabeth Ire, est probablement la plus plausible.

Néanmoins, comme Denis Stevens l’a fait remarquer par la suite, un récit presque contemporain, datant de 1611, décrit comment Tallis reçut commande de cette œuvre, sans doute passée par Thomas Howard, quatrième duc de Norfolk, en réponse au Ecce beatam lucem de Striggio qui comportait quarante parties. Le premier concert de Spem in alium fut donné dans la longue galerie à Arundel House, sur le Strand.

Le manuscrit Egerton, le plus ancien à avoir survécu de ce chef d’œuvre, propose une contrafacture en anglais, Sing and glorify heaven’s high majesty. Cette version fut incontestablement produite à l’occasion de l’investiture comme prince de Galles du prince Harry (Henry Frederick Stuart) en 1610 et répétée en 1616 lorsque Charles succéda à son frère aîné, après la mort de celui-ci. Dans le manuscrit, le nom de Harry figure clairement dans chaque partie, puis il est barré pour être remplacé par celui de Charles. Le texte anglais n’est pas une traduction du latin, mais un nouveau poème écrit pour le remplacer, syllabe par syllabe. Les autorités avaient certainement décidé que la qualité musicale de Spem in alium convenait à une occasion aussi imposante que cette cérémonie d’investiture, mais que le texte latin était inapproprié car trop empreint de tristesse.

Alistair Dixon, mars 2003

contrafacture

Traduction peu usuelle du latin contrafactum ou contrafacta, plus souvent conservé en français.

Le terme désigne un arrangement fait à partir d'une composition vocale existante en lui adaptant de nouvelles paroles.Au XVIe siècle, on employait le terme « travestissement », aux XVIIe et XVIIIe siècles celui de « parodie ». Mais ce dernier mot pouvait aussi recouvrir des transformations plus profondes qu'un simple change

Textes Chantés

1. Spem in Alium

Spem in alium nunquam habui praeter in te, Deus Israel, qui irasceris, et propitus eris, et omnia peccata hominum in tribulatione dimittis.

Domine Deus, Creator coeli et terrae, respice humilitatem nostram.

Je n’ai jamais placé mon espérance en aucun autre que toi, ô roi d’Israël, toi dont l’ire fait place à la miséricorde, toi qui absous tous les péchés de l’humanité souffrante.

Ô Seigneur Dieu, créateur de la terre et du ciel, considère notre humilité.

2. Sing and glorify

Sing and glorify heaven’s high majesty, author of this blessed harmony; sound divine praises with melodious graces. This is the day, holy day, happy day, for ever give it greeting, love and joy, heart and voice meeting.

Live Henry princely and mighty, Henry live in thy creation happy.

Chante donc la gloire des cieux majestueux auteur de cette harmonie bénie fais résonner louange divine en grâces mélodieuses. Voici venu le jour, le jour béni, le jour bienheureux, à jamais baille-lui bienvenue, adoration et allégresse, cœur et voix entremêlés.

Longue vie à Henri, qu’il soit princier et puissant et qu’il vive heureux au cœur de ta création.

 

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