Richard STRAUSS

Munich, 11 juin 1864 - Garmisch, 8 septembre 1949

 

 

Lucas van Leyden, Eulenspiegel, Kupferstich, 1520

 

Quatre dernières minutes de 

Till l’Espiègle

 

http://www.radiofrance.fr/chaines/orchestres/journal/oeuvre/fiche.php?oeuv=5000005

Strauss : Till l'espiègle

...Till l'espiègle fut composé au cours de la décennie qui vit la naissance des grands poèmes symphoniques inspirés à Richard Strauss par des arguments littéraires, poétiques et philosophiques d'origines variées, décennie inaugurée en 1889 par la fantaisie symphonique Aus Italien – hommage, d'une certaine manière, à Harold en Italie de Berlioz et à la Symphonie italienne de Mendelssohn. Ces poèmes symphoniques reprennent à leur compte quelques unes des conceptions de Liszt, tout en transcendant le genre par une verve orchestrale et mélodique, et un renouvellement constant de la forme elle-même, qui ne caractérisent pas précisément les œuvres du compositeur hongrois.

C'est ainsi que virent le jour, successivement, à la suite d'Aus Italien : Macbeth, Don Juan, Tod und Verklärung (Mort et transfiguration), Till Eulenspiegels lustige Streiche (les Joyeuses équipées de Till l'espiègle), Also sprach Zarathustra (Ainsi parlait Zarathoustra), Don Quixote (Don Quichotte), enfin Ein Heldenleben (Une Vie de héros). Strauss se consacrera ensuite essentiellement à la scène, de Feuersnot (1901) et Salomé (1905) jusqu'à l'ultime Capriccio, créé à Munich en 1942.

Strauss à Paris

Richard Strauss porta d'une certaine manière à son comble le style du poème symphonique, mais il aura toujours à cœur de ne jamais être prisonnier des textes choisis comme source d’inspiration de ses œuvres. "Dans ses Souvenirs de jeunesse, raconte Bruno Serrou, Strauss
rappelle que c'est sous l'emprise des écrits de Wagner, Schopenhauer et de ses conversations avec Ritter, mais aussi à l'encontre de Brahms et de Bruckner, qu'il pressentit avoir atteint les limites de ce que pouvait offrir l'esthétique
classique, notamment la forme sonate. En mars 1889, il confiait à l'un de ses amis : 'Musique à programme : vraie musique ! Musique pure : composition possible par tout individu passablement musicien doté d'une routine et d'un métier certains ! La première : art véritable ! La seconde : savoir faire !'"

Till l'espiègle, poème symphonique en forme de rondo inspiré d'une ancienne légende picaresque, fut achevé en 1895 à Munich et créé le même année, au Gürzenich de Cologne, sous la direction de Franz Wüllner. L'oeuvre consacra le succès international du compositeur, qui fut invité dans toute l'Europe (y compris à Paris, où il se rendit pour la première fois en tant que chef, à l'invitation d'Edouard Colonne, au Châtelet) et en Amérique pour la diriger.

Un programme ou non ?

"Echaudé par ses expériences
antérieures, poursuit Bruno Serrou, Strauss renonça à publier le programme de son nouveau poème symphonique. Il alla même jusqu'à
refuser de mettre sur la piste son confrère Franz Wüllner, qui devait pourtant assurer la création de l'œuvre. Il envisagea néanmoins de l'expliquer plus ou moins, du moins si l'on croit la partition qu'il offrit à son confrère Wilhelm Mauke, sur laquelle il porta de sa main vingt-trois motifs qui sont autant d'épisodes de son poème symphonique et qu'il accompagne d'un commentaire littéraire :

'1) Il était une fois un bouffon coquin 2) nommé Till l'Espiègle. 3) C'était un malicieux lutin 4) parti vers de nouvelles facéties. 5) Attendez un peu, poltrons ! 6) Hop ! à cheval à travers les étals des marchandes de poissons. 7) Il file avec des bottes de sept lieues. 8) Caché dans un trou de souris. 9) Déguisé en pasteur, il suinte l'onction et la morale... 10) Toutefois, le vaurien se révèle par son gros orteil. 11) Mais comme il se rit de la religion, il ressent soudain une peur panique de la mort. 12) Till chevaleresque et échangeant des grâces avec de charmantes jeunes filles. 13) Il leur fait la cour. 14) Un élégant refus est aussi un refus. 15) Jure vengeance contre la race humaine.
16) Motif des philistins. 17) Après avoir démontré aux philistins quelques thèses plutôt monstrueuses, il les abandonne, ahuris, à leur sort. 18) Grimace à distance. 19) Rengaine de Till. 20) Le tribunal. 21) Il sifflote nonchalamment. 22) Sur l'échafaud. 23) Là, il pendille, l'air lui manque, un dernier spasme, la part mortelle de Till a vécu.'

Strauss néglige de commenter l'épilogue qui, il est vrai, affirme clairement qu'il se trouvera toujours un Eulenspiegel pour importuner les philistins..."

Tel quel, Till est l'un des poèmes symphoniques les plus souvent joués de Strauss....

C. W.

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