Un écrivain se livre... aux élèves de l’Athénée.
Celui-ci a répondu sans tabous aux questions des élèves, à l’exception du devenir de ses personnages, pour ne pas rompre le charme de la lecture. Ce projet pédagogique, initié en début d’année scolaire grâce à l’appui déterminant de M. et Mme Cerfontaine, de L’oiseau Lire, a permis de faire participer pleinement certaines classes; depuis quelques semaines déjà, les professeurs avaient donné comme consignes à leurs élè-ves de prévoir les questions à poser à cet hôte peu banal et tant attendu. Imaginez l’émulation née chez ceux-ci quand ils apprirent la réalité de cette visite... Et il n’est pas excessif de prétendre que l’impact fut aussi grand que l’eût été la venue d’Alphonse Daudet, dans les années 1880-1890, au sein d’un collège français pour parler de ses Lettres de mon moulin à une classe de jeunes gens émerveillés, autorisés à poser des questions sur les histoires proposées, la méthode d’écriture...
Th. Lavachery, conteur génial et artiste de notre langue, apparut vite comme un communicateur hors pair. Répondant à toutes les questions, ne multipliant pas les di-gressions par souci de clarté, il fut plus efficace pour éclairer les jeunes sur le monde de l’édition et la vie d’un écrivain de notre siècle que n’importe quel cours bien documenté. Les étudiants apprirent ainsi qu’il écrit en moyenne six heures par jour, que ses proches lisent ses textes avant la publication sans se priver des critiques et, le plus important peut-être, que c’est son fils, grand amateur de récits merveilleux, à mi-chemin entre le conte et l’épopée, qui le poussa involontairement vers ce type d’écriture. Avant cela, il se consacrait beaucoup à la bande dessinée. Aujourd’hui, comme la publication ne nourrit pas son homme même si le succès est certain, Th. Lavachery se consacre, en parallèle, à une autre passion: la réalisation de documentaires géographiques et ethno-graphiques en collaboration avec la RTBF. Il vient également de publier un livre bien documenté, déjà disponible en librairie, sur une exploration de l’Ile de Pâques effectuée par son grand-père dans les années ’30.
Et l’échange qui s’est déroulé durant deux heures avec la séance de dédicaces fut pour le moins constructif car l’auteur, aussi, est très attentif à son public; il l’interroge sur ses goûts de lecture, ses motivations et reconnaît le côté épanouissant, pour l'écrivain aussi, de venir ainsi converser dans les milieux scolaires. Il a même marqué son éton-nement pour l’engouement de son auditoire, la précision des questions sur l’oeuvre et l’efficacité d’un projet pédagogique mené à l’Athénée depuis douze ans avec succès en 1ère année: le défi-lecture. Ce fut même l’élément déclencheur de leur goût pour la lec-ture ont reconnu certains intervenants de 2ème année. N’oublions pas non plus les vis-ites annuelles de certains groupes de l’Athénée à la Foire du Livre, à Bruxelles.
En effet, s’il y a bien quelque chose qui ne s’impose pas, tel un règlement scolaire ou une façon d’accorder un verbe, c’est la lecture... L’école doit tout mettre en oeuvre pour insister sur le plaisir de lire, le bénéfice apparaîtra de lui-même. A une époque où la vidéo investit tous les secteurs de la société, il est bon que la tradition du livre marque sa force dans la différence et la complémentarité... Et quand l’enseignant rencontre sur son chemin des auteurs comme Th. Lavachery, capables de captiver un large public sans concession pour la facilité et la simplification, il sait immédiatement que sa mission est noble.
Thierry Graindorge,
professeur de français