L’artiste
transforme la scène attendue de la renaissance du printemps et de la
cueillette des fleurs en une scène courtoise, au pied du château de
Dourdan, propriété de Jean de Berry, détruite en 1411,
dans ce cas, la rivière
qui coule au pied du château serait l'Orge
Certains chercheurs
pensent qu’il s’agit de Pierrefonds, propriété de Louis d’Orléans
et nous aurions alors au-devant, l'Étang du roi
Cette miniature
nous montre que Les Très Riches Heures peuvent se lire comme une chronique
des fastes princiers autour du duc et de sa famille.
Dans
un décor de renaissance printanière, marqué par le choix des couleurs
vives, riches et lumineuses, à travers une composition extrêmement
équilibrée, l’artiste rend encore
une fois hommage à la toute-puissance de
Jean de Berry
: le premier plan séparé en trois parties :
à
droite, en une perspective cavalière, l’image
est délimitée par l’architecture d’un verger clos de murs et d’un édifice
à créneaux, à gauche, une scène d’amour courtois; au centre, la
traditionnelle cueillette des fleurs.
Partie
gauche, un couple - probablement
Charles d'Orléans et
Bonne d'Armagnac, petite-fille
de Jean de Berry dont les fiançailles furent célébrées le 18 avril
1410 à Gien – s’échangent une bague devant deux témoins. Le groupe
est accompagné d’un fou, représenté derrière, plus petit que les
autres. L’artiste a apporté une grande attention à l’expression des
personnages (le fiancé regarde amoureusement sa promise qui baisse
pudiquement les yeux ainsi que l’exigeaient les bienséances de
l’époque) et à la somptuosité des vêtements, l’habit du jeune
homme est semé de couronnes princières. |
A
droite le verger
du seigneur, situé comme il se doit hors du mur d’enceinte, est ici
représenté de manière beaucoup plus réaliste que dans la littérature
courtoise . Les arbres en espaliers fournissent au château les
fruits, les carrés du potager donnent les légumes et les herbes
aromatiques, les plantes textiles et médicinales
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Partie
centrale, deux élégantes suivantes cueillent des fleurs.
Au Moyen-âge, malgré leur ressemblance, les vêtements devaient
absolument distinguer la femme de l’homme. Les personnages
représentés suivent la mode de leur temps car être à la dernière
mode signifie la puissance et la richesse. Une des suivantes
porte une houppelande. Elle n'est pas ouverte devant, ni fendue
latéralement comme celle des
hommes, bienséance oblige. La ceinture de
tissu, bouclée dans le dos, est placée juste sous les seins. Les
manches
sont ouvertes et amples ou fermées et
resserrées aux poignets. La houppelande est taillée dans un drap de
laine
ou d'or, de satin ou de velours, fourrée
l’hiver. Quant à la coiffure, les oreilles sont dégagées et la
chevelure est réunie sous une coiffe. Pour mettre en valeur le
front, les cheveux sont séparés par une raie médiane ou bien tirés
en arrière. Mais on peut aussi les porter détachés sur les épaules.
Le bourrelet d'étoffe, rembourré de coton ou d'étoupe, que porte la
suivante en noir, s'ajoute à la coiffe au début du XVe siècle ; il
peut être brodé, orné de plumes ou de chatons. Le choix des couleurs
est guidé parla mode mais aussi par des considérations
hiérarchiques. Le bleu est à cette époque la couleur la plus
raffinée, elle a détrôné la pourpre chez les laïques. Les
aristocrates du Moyen-âge recherchent les couleurs les plus
lumineuses : bleu, rouge aux diverses nuances, blanc, vert et jaune. |
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Charles a chanté Bonne
dans une ballade (no47)
"Pour le plus heureux sous la nue
Me tiens quand m'amie m'appelle
Car en tous lieux où est connue
Chacun l'appelle la plus belle.
Dieu doint (Que Dieu me donne) que, malgré le rebelle
Danger, je la voie briefment
Et que de sa bouche me die
Ami, pensez que seulement
C'estes vous de qui suis amie".
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