La
Quarante et unième est la dernière des symphonies composées
par Mozart qui, si l'on tient compte de ses symphonies dites «de
jeunesse» (mais la première «officielle», K 16, fut écrite alors
qu'il n'avait que huit ans !), en laissa en réalité environ
cinquante-cinq. Mozart, comme il le fit pour le concerto pour piano,
magnifia le genre sans pour autant bouleverser une conception héritée
des compositeurs viennois, notamment Carl Ditters von Dittersdorf et
bien sûr Joseph Haydn, lequel commença de s'intéresser à la
symphonie au moment où Mozart voyait le jour.
On sait que les compositeurs de l'école de Mannheim (essentiellement
Johann Anton Stamitz et son fils Carl) n'eurent qu'une influence
indirecte et secondaire sur les Viennois et entretinrent des rapports
plus féconds avec les musiciens parisiens. On rappellera aussi que les
premières symphonies de Mozart, considérées comme des œuvres de
divertissement, étaient destinées à être exécutées une seule fois.
La Symphonie «Jupiter» fut achevée le 10 août 1788.
Elle clôt avec brio la trilogie finale des symphonies de Mozart, mise
au point en huit semaines au cours de ce même été, sans qu'on sache
avec précision quand ces trois partitions furent jouées pour la première
fois (au Gewandhaus de Leipzig en 1789 ? à Vienne un peu plus tard ?).
Elle ne fait aucunement référence aux dieux de l'Olympe (aucun
programme, aucun argument littéraire ne vient accompagner la partition)
mais fut ainsi baptisée par le violoniste et organisateur londonien de
concerts Johann Peter Salomon au début du XIXe siècle.
De Jupiter à Prométhée
Il est vrai que cette symphonie convient parfaitement à tous ceux qui,
rétrospectivement, ont vu dans le Mozart des dernières années un génie
visionnaire annonçant le grand Beethoven : «De Jupiter à Prométhée,
il n'y a qu'un pas», écrit François Dupray. Héros malgré lui,
Mozart est aux prises, à cette époque, à des difficultés
croissantes, à des «idées noires», à des difficultés financières
qui le poussent à emprunter de l'argent à son frère de loge Puchberg.
Sa fille Theresia meurt, âgée de moins d'un an, le 29 juin : les années
sombres commencent.
Ainsi donc, «la force succède au charme» (François Dupray). La Symphonie
«Jupiter», largement développée et d'un magistral équilibre par
ses proportions, est aussi une œuvre de victoire par ses accents héroïques.
Elle oppose volontiers les vents aux cordes mais, contrairement à la Trente-neuvième,
qu'on appelle parfois pour cette raison «Symphonie maçonnique»,
n'utilise pas la clarinette (la partie de clarinette de la Quarantième
fut quant à elle ajoutée après coup).
Elle se compose de trois mouvements d'une durée à peu près égale, et
d'un menuetto nettement plus bref. La vigueur du premier mouvement
contraste vivement avec l'intimité du mouvement lent qui impose les
sourdines aux instruments à cordes, qu'il fait dialoguer avec les bois
dans une atmosphère d'une tendresse extrême. Le menuet qui suit, plein
d'allant, fait figure d'intermède avant le superbe finale, mouvement de
forme sonate traité en fugato qui s'achève dans l'éclat.
Christian Wasselin
http://www.radiofrance.fr/chaines/orchestres/journal/oeuvre/fiche.php?oeuv=100000021 |