Dimitri CHOSTAKOVITCH

Saint-Pétersbourg, 1906 - Moscou, 1975

 

Marteau pilon poil au menton - R. Topor

Six premières minutes de la Symphonie n°5

Cette symphonie fut sous-titrée par le compositeur "réponse d'un artiste soviétique à la critique justifiée"

Elle se compose de 4 mouvements, 

"moderato", "Allegretto", "Largo" et "Allegro non troppo"

1937
Quelques semaines suffisent à Chostakovitch pour achever sa Cinquième Symphonie ; créée à Leningrad dès le 21 novembre sous la direction d'Evgeni Mravinski, aussitôt reprise à Moscou, celle-ci connaît un succès immédiat. Réponse à de justes critiques selon son auteur, elle suscite un débat auquel il sera délicat d'apporter des conclusions définitives : «Tout, explique Chostakovitch, n'a pas été d'égale valeur dans mes œuvres précédentes. Il y a eu des échecs. Dans ma Cinquième Symphonie, je me suis efforcé à ce que l'auditeur soviétique ressente dans ma musique un effort en direction de l'intelligibilité et de la simplicité.»

Choix délibéré, volonté de se protéger ou, plus habilement, de gagner l'estime de ceux qui décident ? Contrastes traditionnels du bithématisme dans l'Allegro, scherzo et mouvement lent à leur place habituelle, l'œuvre conserve de la symphonie sa structure typique. Et qu'importe si la soumission au nouvel ordre social est bien réelle, si l'apothéose finale, conventionnelle et presque déplacée en ces lieux, répond aux exigences politiques d'une musique qui se veut, selon le manifeste déjà cité, à l'image de «la victoire des principes progressistes de la réalité, tout ce qui est héroïque, brillant et beau.» Car cet abandon est relatif ; c'est bien de l'homme individuel, de l'auteur lui-même que l'on parle ici, et le triomphe incriminé est aussi l'annonce d'un défi ou d'une consécration méritée.

De l'œuvre, Chostakovitch donnera lui-même plusieurs interprétations, attentif aux circonstances et, fatalement, s'enfonçant dans les contradictions : «Le thème de ma Cinquième Symphonie, expliquera-t-il d'abord, est le façonnement d'un homme. Je voyais l'homme avec toutes ses expériences au centre de la composition, qui est de forme lyrique du début à la fin. Dans le finale, les impulsions tragiques et tendues des mouvements antérieurs sont résolues dans l'optimisme et la joie de vivre.» Plus tard, l'homme ne sera plus aussi libre, et la satisfaction cédera au sarcasme : «Je crois que ce qui se passe dans la Cinquième est clair pour tout le monde… C'est comme si l'on vous frappait avec un bâton en disant : "Votre rôle est de vous réjouir, votre rôle est de vous réjouir", et que vous vous leviez, en tremblant, et partiez en marmonnant : "Notre rôle est de nous réjouir, notre rôle est de nous réjouir."»

François-Gildas Tual

http://www.radiofrance.fr/chaines/orchestres/journal/oeuvre/fiche.php?oeuv=150000033