Luigi CHERUBINI
Florence, 14 septembre 1760 ; Paris, 15 mars 1842 |
1789 Dans la capitale, Cherubini acquiert très rapidement une situation de premier plan. Avec Viotti, il installe aux Tuileries une troupe lyrique italienne, " Théâtre de Monsieur ", dont il sera le directeur musical jusqu'en 1792. Il fera notamment représenter les meilleures œuvres de Paisiello et Cimarosa. 1791 L'opéra de Cherubini, Lodoiska est accueilli chaleureusement et confirme la puissante originalité de son talent. Le compositeur bouleverse les habitudes scéniques française en proposant un nouveau style dramatique. Il influencera nombre de compositeurs français parmi lesquels on peut citer Mehul, Berton, Lesueur et Grétry. 1792 A la Révolution française, l'Opéra italien est dissout. 1794 Le style de Cherubini évolue, le compositeur fait preuve d'une maîtrise remarquable de l'orchestration. 1795 Cherubini est nommé inspecteur au nouvel Institut national de musique - futur Conservatoire de Paris. 1797 Avec son opéra Médée, le compositeur signe l'acte de naissance du drame romantique. 1800 Avec Les Deux journées ou Le Porteur d'eau, Cherubini signe son plus grand succès. 1805 Cherubini, tombé en disgrâce sous Napoléon, est invité à Vienne où il rencontre les plus grands musiciens de l'époque, Haydn et Beethoven. Créé à Vienne, l'opéra de Cherubini, Faniska, remporte un immense succès. 1809 De retour à Paris, déçu par le peu de succès de son opéra, Pimmalione, et les difficultés financières, Cherubini revient vers la musique religieuse et compose sa célèbre Messe en fa à trois voix. Le succès est tel qu'il délaisse quelque peu les compositions dramatiques. 1815 Suite à l'invitation de Clementi à Londres, Cherubini compose une symphonie, une cantate, une ouverture et un Hymne au printemps pour la Philharmonic Society. 1816 Cherubini perd sa place au Conservatoire mais est nommé surintendant de la Chapelle royale. De 1822 à sa mort, Cherubini est directeur du Conservatoire de Paris. A partir de 1837, il se consacrera uniquement à l'enseignement et il aura parmi ses élèves Auber et Halévy. En 1814, il est fait membre de l'Institut et chevalier de la Légion d'honneur. En 1841, premier musicien à jouir d'un tel honneur, Cherubini est commandeur de la Légion d'honneur. Il aura des funérailles nationales durant lesquelles sera joué son Requiem en ré mineur. | ||||
Requiem en ut mineur, à la mémoire de Louis XVI 1816 | ||||
Requiem (n° 2) en ré mineur, pour voix d'hommes et orchestre 1836 |
C’est en 1834, alors qu’il prend ses
fonctions de directeur de l’Académie de France à Rome, qu’Ingres commence
le portrait de Cherubini. On ne sait s’il s’agit d’une commande du
musicien ou d’une décision du peintre. Cherubini est représenté assis,
appuyé contre une colonne de stuc, sous un porche antique. D’une main il
se tient la tête, de l’autre sa canne. Il porte un carrick (une redingote)
noir entrouvert. Il a l’air très concentré. Derrière lui et hors de son
champ de vision se dresse Terpsichore, muse de la danse, des chœurs
dramatiques et de la poésie lyrique. Elle tient une lyre, son attribut.
Elle étend son bras droit sur la tête du musicien dans un geste de
protection en même temps qu’elle le désigne à l’admiration des hommes.
Dans un premier état Ingres avait peint un carrick jaune moutarde et le
musicien était assis dans un fauteuil de velours rouge. Cette modification
est aujourd’hui bien perceptible car cette partie de la toile d’Ingres est
sans crevasses et forme une sorte de cerne autour du buste du modèle.
Ce
portrait de Cherubini rencontra en France un immense succès.
Louis-Philippe acheta le tableau pour le musée du Luxembourg, y
reconnaissant un tableau « moderne » plus qu’une œuvre à caractère
historique. Ingres est cependant déçu ; il espérait voir son tableau au
musée de l’Histoire de France de Versailles, créé par le roi. http://www.histoire-image.com/site/oeuvre/analyse.php?liste_analyse=442
Né Allemand, Henri Lehmann arrive en France en 1831 et entre dans l’atelier d’Ingres. Il expose au Salon à partir de 1835 où il présente le Départ du Jeune Tobie (Hambourg, Kunsthalle), premier tableau d’un cycle qu’il poursuivra jusqu’en 1866. Etranger, il ne peut concourir pour le prix de Rome, et gagne à ses frais la ville éternelle en 1839. Il y rejoint Ingres, son maître, alors directeur de l’Académie de France, avec qui il entretient d'étroites relations. http://www.latribunedelart.com/Artistes%20-%20Henri%20Lehmann.htm
LE SALON DE 1836 Revue des Deux Mondes, tome 6, 1836 ALFRED DE MUSSET Tout le monde se souvient du Tobie exposé l'année dernière par M. Lehmann. Il y avait, dans ce début, non seulement tout ce qui annonce un beau talent, mais encore ce qui le constitue. C'était à la fois une espérance et un résultat. Aussi n'avait-on pas manqué d'encourager le jeune artiste; sa Fille de Jephté a fait changer quelques journaux de langage, et il ne faut pas qu'il s'en étonne ni en même temps qu'il s'en inquiète. S'il regardait les critiques qu'on lui adresse comme injustes et mal raisonnées, il aurait tort, et s'engagerait peut-être dans une route qui n'est pas la vraie. Mais il se tromperait plus encore si, en reconnaissant la justice des critiques, il se laissait décourager. Le public ne blâme dans son ouvrage que de certaines parties, qu'en effet il me semble impossible d'approuver. Pour parler d'abord des défauts matériels, il y a, dans les sept figures de ses femmes, une monotonie qui fatigue; elles se ressemblent toutes entre elles, plus ou moins, une exceptée, qui est charmante, et dont la beauté fait tort à ses soeurs; c'est celle qui est assise et inclinée à la droite de la fille de Jephté. Toutes les autres (je suis fâché de faire une remarque qui a l'air d'une plaisanterie), toutes les autres ont la tête trop forte, et M. Lehmann connaît sans doute trop bien l'antique pour ne pas savoir que la grosseur de la tête est incompatible avec la grâce des proportions; en outre, les chairs ont une teinte mate qui leur donne l'air d être en ivoire, et qui les fait ressortir trop vivement sur les étoffes et sur le fond, comme dans certains tableaux de l'Albane. Si de ces premières observations on passe à l'examen moral de l'ouvrage, M. Lehmann me permettra de lui dire que dans la composition de sa scène il a oublié une maxime qui a été vraie de tous les temps : c'est qu'on n'arrive jamais à la simplicité par la réflexion. Il est certain qu'en cherchant ces lignes parallèles, en traçant cette sorte de triangle que dessine le groupe des femmes, et que, suivent les montagnes mêmes, l'artiste a voulu être simple. Il l'eût été en y pensant moins. Voilà, je crois, ce qu'une juste critique doit reprocher à M. Lehmann. Maintenant il faut ajouter que le personnage de la fille de Jephté est très beau, vraiment simple d’expression, et parfaitement bien posé. Si le peintre qui l'a conçu n'eût voulu exprimer que la douleur, il se fût contenté avec raison d'avoir créé cette noble figure, et il eût groupé les autres autour d'elle avec moins d'apprêt et de recherche. Les deux femmes qui pleurent debout et qui s'appuient l'une sur l'autre méritent aussi beaucoup d'éloges; elles produiraient bien plus d'effet si l'artiste ne les avait pas fixées comme au sommet d'une pyramide, et si, les laissant au second plan, comme elles sont, il les eût placées à droite ou à gauche de leur soeur, et non pas au milieu de la toile. Que M. Lehmann pense au Poussin; qu'il voie comment ce grand maître dispose ses groupes, les met en équilibre sans raideur, et les entremêle sans confusion. Non que je conseille à M. Lehmann d'imiter le poussin, ni personne; mais il me fâche de voir que dans son tableau il y a non seulement le talent, mais encore les éléments nécessaires pour conquérir l'assentiment de tous: je ne doute pas que ses personnages mêmes, sans y faire de grands changements, mieux disposés, ne pussent plaire à tout le monde. Il me semble, en regardant cette toile, qu'il n'y a qu’à dire à ces deux femmes « Vous, descendez de cette roche, éloignez-vous et pleurez à l'écart; » à cette autre, vue en plein profil : « Faites un mouvement, détournez-vous; » à cette autre : « Regardez le ciel; un geste, un rien va tout changer; la douleur de votre soeur est vraie, simple, sublime; ne la gâtez pas. »
En lisant dans le livret du
Musée les dix lignes du chapitre des Juges qui servent d'explication au
tableau de la Fille de Jephté, je fais une remarque, peut-être
inutile, mais que je livre à l'artiste pour ce qu'elle vaut : c'est que
dans ce fragment, qu’on a dû nécessairement abréger, la simplicité
biblique est singulièrement outrée. Qui a donné ces dix lignes? Est-ce le
peintre lui-même? Je l'ignore. Jephté, dit le livret, en voyant sa fille,
déchira ses vêtements, et dit e Ah! ma fille tu m'as entièrement
abaissé. » Or le latin dit, au lieu de cela : «Heu me, filia mea,
decepisti me, et ipsa decepta es.- Hélas! nia fille, tu m'as trompé,
et tu t'es trompée toi-même. » La fille de Jephté répond, dans le livret :
« Fais-moi ce qui est sorti de ta bouche. » Le latin dit : «Si
aperuisti os tuum ad Dominum, fac mihi quodcumque pollicitus es. -. Si
tu as ouvert ta bouche au Seigneur, fais-moi tout ce que tu as promis. »
Je ne relève pas par pédantisme ces petites altérations du texte. A tort
ou à raison, elles me semblent avoir une parenté avec les défauts du
tableau. Bien entendu que, si c'est le hasard qui en est cause, ma
remarque est non avenue. Le Salon de 1846. Second volume des Salons Charles Baudelaire VIII. DE QUELQUES DESSINATEURS
Dans le chapitre précédent, je n’ai point parlé du dessin imaginatif
ou de création, parce qu’il est en général le privilège des coloristes.
Michel-Ange, qui est à un certain point de vue l’inventeur de l’idéal chez
les modernes, seul a possédé au suprême degré l’imagination du dessin sans
être coloriste. Les purs dessinateurs sont des naturalistes doués d’un
sens excellent; mais ils dessinent par raison, tandis que les coloristes, ll
es grands coloristes, dessinent par tempérament, presque à leur insu.
Leur méthode est analogue à la nature; ils dessinent parce qu’ils
colorent, et les purs dessinateurs, s’ils voulaient être logiques et
fidèles à leur profession de foi, se contenteraient du crayon noir.
Néanmoins ils s’appliquent à la couleur avec une ardeur inconcevable, et
ne s’aperçoivent point de leurs contradictions. Ils commencent par
délimiter les formes d’une manière cruelle et absolue, et veulent ensuite
remplir ces espaces. Cette méthode double contrarie sans cesse leurs
efforts, et donne à toutes leurs productions je ne sais quoi d’amer, de
pénible et de contentieux. Elles sont un procès éternel, une dualité
fatigante. Un dessinateur est un coloriste manqué.
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