Ferruccio BUSONI

 Florence, 1er avril 1866 - Berlin, 27 juillet 1924

 

Albertine Scène 10 de l’Acte II

de Die Brautwahl

 

Busoni reste un des compositeurs du XXe siècle à la personnalité la plus entière. Ses créations lyriques sont peu nombreuses, puisqu'au nombre de quatre.

Die Brautwahl ("Le Choix d'une fiancée") a été créée le 13 avril 1912 à Hambourg avec Élisabeth Schumann dans le rôle d’Albertine.

Inspirée par un conte d'Hoffmann publié en 1820 tiré de "Les Soirées des frères Sérapion", à l'intrigue touffue, la partition montre toute l'originalité et l'inventivité de Busoni.

 

L’action se déroule dans le Berlin libéré et prospère des années 1820 : dans les bosquets du Tiergarten le peintre Edmund Lehsen et la belle Albertine Voswinkel ont le coup de foudre réciproque et fileraient un parfait amour si ne venaient s’interposer deux fâcheux prétendants, le grotesque Thusman secrétaire à la chancellerie et l’élégant et un peu ridicule Baron Boesch. A priori ces derniers ne sont guère dangereux pour la stabilité du couple, mais ils disposent de bons appuis en les personnes respectives du père d’Albertine et du juif Manasse au fort bagout. Heureusement un certain Leonhard, étrange réincarnation d’un orfèvre de la Renaissance, prend le peintre en affection et décide d’utiliser ses nombreux pouvoirs pour lui venir en aide. Mais la fin ne sera pas celle que l’on croit. Pourtant, malgré quelques airs qui auraient dû lui valoir le succès (dont la vigoureuse ballade de l’usurier Lippold, reprise presque intégralement dans la célèbre Toccata pour piano de 1920), l’oeuvre tomba au bout de la quatrième représentation et ne fut par la suite que rarement reprise.

Il est vrai que cet opéra n’est musicalement pas très progressiste. Voire même rétrograde pour cette époque d’avant-guerre qui vit naître Le sacre du Printemps et les premiers balbutiements du dodécaphonisme dont Busoni aura pourtant été un ardent défenseur, et même un pionnier si l’on songe à ses leçons de théorie musicale données dès 1900 à la Humboldt-Universität. Il s’agit ici d’une partition résolument tonale, parfois descriptive ou même pittoresque, et qui n’hésite pas (non sans un certain sens de l’humour) à faire appel aux bonnes vieilles recettes de l’opéra de papa : malédictions, duos d’amour (contre-ut à la clé), sermon paternel, quintette endiablé, chant solitaire près de l’étang, tout y passe.