LE BIGEHI

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  N°6 mai 2004

 ACTUALITÉ

Les jeunes femelles chimpanzés plus habiles que leurs frères

Baleines : tableaux de chasse préhistoriques

Quand le singe crie, l'oiseau dit merci

Un océan de plastique

Actualité

Les jeunes femelles chimpanzés plus habiles que leurs frères

Christiane Galus LE MONDE | 17.04.04

Il est devenu courant de dire que, pendant leurs études, les filles sont plus assidues que les garçons. Il semblerait que cette particularité soit partagée par le plus proche cousin de l'homme, le chimpanzé, lorsqu'il apprend à attraper les termites dont il se délecte.

Pour cette activité, les adultes utilisent des branches effeuillées qu'ils rentrent dans un trou creusé dans l'habitacle des insectes. Cette opération nécessite un apprentissage qui commence tôt chez les jeunes chimpanzés. Elisabeth Lonsdorf, une spécialiste du comportement animal de l'université du Minnesota (États-Unis), a étudié pendant quatre ans le comportement de quatorze jeunes chimpanzés sauvages vivant dans le Gombe National Park , en Tanzanie.

Elle a observé que les femelles commencent à extraire les termites à un âge moyen de 31 mois, tandis que les mâles y parviennent à 58 mois. Et, lorsque les jeunes femelles ont acquis la bonne technique, elles "recueillent des termites plus fréquemment et en plus grande quantité que les petits mâles", expliquent les scientifiques dans la revue Nature du 15 avril. Simplement parce qu'elles passent plus de temps à observer leur mère en train d'opérer, et reproduisent fidèlement ses gestes, tandis que leurs frères, plus dissipés, préfèrent jouer sur la termitière.

"A ma connaissance, précise Elisabeth Lonsdorf, c'est la première fois que l'on constate systématiquement chez des chimpanzés sauvages une différence de comportement entre les sexes en ce qui concerne l'acquisition de connaissances ou l'utilisation d'outils."

Une telle distinction s'explique par la recherche de la nourriture chez les adultes. Ils trouvent les protéines dont ils ont besoin en se nourrissant de singes colobes ou de termites. Les mâles adultes partent chasser les petits singes dans les arbres, mais les femelles ne peuvent les suivre, car elles transportent leur petit. Aussi préfèrent-elles rester à terre et rechercher des termites. Il se produit, ainsi, une séparation des tâches. Pour les auteurs de l'étude, cette similitude de comportement avec l'espèce humaine pourrait indiquer qu'elle existait déjà il y a 6 à 7 millions d'années chez l'ancêtre commun de l'homme et du chimpanzé.

 

Baleines : tableaux de chasse préhistoriques

Paléontologie. Découverte de gravures sur un site néolithique sud-coréen.
Laurie DESORGHER 28/04/04 Libération

Les populations néolithiques chassaient déjà la baleine. C'est ce que prouvent des représentations de scènes de chasse qui viennent d'être découvertes sur le site néolithique (6000-1000 av. J.-C.) de Bangu-dae, dans le sud-est de la péninsule coréenne. Selon Sang-mog Lee, du Museum of Kyungpook National University, et Daniel Robineau, du Musée national d'histoire naturelle, qui ont publié cette découverte dans la revue l'Anthropologie (volume 108), il s'agit des représentations les plus anciennes et les plus explicites jamais trouvées : quarante-six gravures, en majorité de grands cétacés, parmi lesquelles des mysticètes (dont la baleine fait partie) et des cachalots. Des scènes de chasse typiques y sont représentées : cinq embarcations au total, avec, à leur bord, entre cinq et dix-huit personnes. Sur la plus détaillée, on peut distinguer un bateau figuré par des lignes courbes, avec un équipage d'une quinzaine de chasseurs, relié par une ligne à un cétacé. Plusieurs types d'outils sont identifiables : le harpon et divers objets, interprétés par les deux chercheurs comme des flotteurs qui, fixés au harpon par une ligne, permettaient de freiner et de retrouver les proies. Des représentations de filets prouvent également que les hommes les utilisaient déjà.  Pour Lee et Robineau, ces découvertes sont exceptionnelles en ce qu'elles constituent un formidable témoignage des méthodes de chasse de l'époque, mais aussi des espèces qui vivaient dans la région pendant la préhistoire. Toutes celles qui sont représentées sur le site sont, aujourd'hui, rares ou absentes au large de la Corée. Mais ces découvertes sont également importantes d'un point de vue sociologique. Elles permettent de comprendre les rites de l'âge de pierre. Le faible nombre de représentations de petits cétacés, par exemple, suggère déjà leur moindre importance économique.  De même, des traits représentés sur les corps de certains cétacés laissent à penser que la nourriture était souvent partagée, élément fondamental de la cohésion sociale dans les sociétés de chasseurs.

Quand le singe crie, l'oiseau dit merci

Éthologie. Selon une étude, le signal d'alarme d'une espèce peut être compris par une autre.Par Laurie DESORGHER
mercredi 28 avril 2004 Libération
Les cris d'alarme d'un animal ne servent pas qu'à alerter sa propre espèce. Hugo Rainey, Klaus Zuberbühler et Peter Slater, de l'université anglaise de Saint Andrews, viennent de démontrer que le cri de certains animaux est également un signal pour d'autres espèces ayant le même prédateur.

En Afrique de l'Ouest, les singes Diana émettent des signaux d'alerte différents lors des attaques de leurs deux principaux ennemis : les léopards et les aigles couronnés. Ces primates vivent souvent dans les mêmes arbres que les calaos, espèce d'oiseau à long bec, parmi les plus grands de la forêt ivoirienne. Sans être la proie des léopards, ces oiseaux sont, comme les singes Diana, chassés par les aigles couronnés.

Zuberbühler, spécialiste du langage animal, a montré que les calaos sont prévenus de la présence de leurs prédateurs par les cris des singes.

Ils savent faire la différence entre les cris émis lors d'attaques d'aigles ou de léopards. Dans le premier cas, les oiseaux peuvent fuir et crier à leur tour pour prévenir les autres calaos, et tenter de décourager l'attaquant. Dans le second cas, n'étant pas menacés par les léopards, ils ne crient pas, pour éviter de signaler leur présence à d'autres prédateurs.

C'est la première fois que l'on découvre que les cris de singes sont également compris par des oiseaux. Pour Rainey, qui a longtemps vécu en Côte-d'Ivoire, cette découverte est extraordinaire : "Dans la forêt ivoirienne, les animaux sont extrêmement nombreux, leurs cris se superposent et il est très difficile de faire la différence entre chacun d'eux. C'est impressionnant car les calaos, eux, peuvent les différencier." Zuberbühler explique que les deux espèces reconnaissent leurs cris car elles cohabitent, et donc entendent en permanence leurs langages respectifs. L'habitude leur permet de savoir parfaitement associer les cris émis dans chaque situation. Et Rainey estime pouvoir découvrir très vite que d'autres espèces ont les mêmes facultés, mais le contexte politique de la Côte-d'Ivoire a forcé les scientifiques à suspendre leurs recherches.

 

Un océan de plastique

Les déchets de plastique sont désormais omniprésents au bord des mers, de même que dans les mers. Et la partie qu'on peut voir –bouteilles, sacs et autres objets contondants– n'est que la partie visible de l'iceberg.

C'est qu'il y a aussi des myriades de morceaux microscopiques de plastiques

 qui s'incrustent dans les sédiments, le sable et les cailloux des plages, où ils sont évidemment ingérées par les vers, les oiseaux marins et autres bestioles du coin. Sans que nul ne puisse en évaluer les conséquences. Des chercheurs britanniques publient dans la dernière édition de la revue Science une analyse de 17 sites britanniques: même les plages d'un sable blond immaculé contiennent ces composés de plastique. Il y en a partout, et plusieurs formes de plastiques ou de polymères sont représentées incluant le nylon, le polyester et l'acrylique. Ce qui suggère que le problème est répandu un peu partout...

... et qu'il sera de plus en plus lourd. Parce que les produits que nous fabriquons en plastique ont généralement une durée de vie assez courte, de sorte que nous les jetons rapidement; or, le plastique est une matière très durable, qui sera encore dans l'environnement dans plusieurs siècles.

Au fil des années, des chercheurs se sont intéressés aux déchets de grande taille à cause desquels les oiseaux de mer et certains poissons s'étranglent; d'autres ont même établi que des déchets capables de flotter peuvent transporter des insectes jusqu'à des terres qu'ils n'ont jamais habitées auparavant. Mais aucun chercheur ne s'est encore penché sur l'impact de ces débris microscopiques, déplorent Richard Thompson, de l'Université de Plymouth et ses collègues de l'Université de Southampton, dont les 17 zones analysées étaient toutes situées près des côtes ou à une quinzaine de mètres de profondeur.

Ces débris s'accumulent-ils dans la chaîne alimentaire –jusqu'à nous? La porte est ouverte à une nouvelle étude... et à une inquiétude de plus pour notre avenir

http://www.sciencepresse.qc.ca/manchettes.html