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N°2 octobre 2004

ACTUALITÉ

Téléphone portable : risque accru de tumeur à l’oreille

Ces bactéries de feu figées dans le froid

Il y a 10 000 ans, homme et  climat ont favorisé la disparition des grands mammifères.

Grands singes : une nouvelle espèce en Afrique ?

 

   Brève

Un cocotier au pôle Nord

Actualité

Téléphone portable : risque accru de tumeur à l’oreille

 

L’’utilisation du téléphone mobile pendant au moins dix ans augmente le risque de neurome acoustique -une tumeur bénigne de l’oreille- selon une étude menée en Suède par l’Institut de médecine environnementale (IMM) de l’Institut Karolinska. La tumeur se développe du côté où l’utilisateur colle son téléphone à son oreille.

Les chercheurs de l’IMM ont étudié les cas de 150 personnes atteintes de neurome acoustique et de 600 autres personnes exemptes de cette tumeur. Ils ont constaté que le risque était presque multiplié par deux pour les personnes ayant utilisé un téléphone cellulaire dans les dix ans précédant le diagnostic. En-deçà de 10 ans, aucune augmentation significative du risque n’a été constatée.

Le neurome acoustique est une tumeur non-cancéreuse opérable se développant dans l’oreille. La tumeur provoque des vertiges, des baisses d’auditions, des acouphènes et parfois des problèmes d’équilibre. Après traitement les pertes auditives et les acouphènes peuvent perdurer.

L’étude suédoise concerne l’utilisation de téléphones analogiques, une génération plus ancienne de portables, et les chercheurs précisent que les résultats pourraient être différents avec les appareils numériques. Ces travaux ont été menés dans le cadre d’une plus vaste étude internationale sur les effets des champs électromagnétiques, INTERPHONE, coordonnée par l’OMS et le Centre International de recherche sur le cancer de Lyon (CIRC).
C.D.  (14/10/04)

 

Ces bactéries de feu figées dans le froid
Par Sylvestre HUET
samedi 25 septembre 2004 (Libération - 06:00)
 Biologie. Le lac Vostok est-il vivant ou stérile?

Une équipe franco-russe résout l'énigme.

 

 «Un scénario solide.» Pour Jean-Robert Petit, l'énigmatique découverte de son équipe franco-russe ­ de l'ADN de bactéries thermophiles (aimant la chaleur) dans le lac Vostok, enclavé sous près de 4 km de glace au cœur de l'Antarctique ­ a trouvé une explication qui «tient la route» (1). En fait, cet ADN aurait une origine externe. Et Vostok, le plus vaste lac sous-glaciaire connu, serait «complètement stérile». En particulier en raison d'une concentration «cent fois plus élevée qu'un lac de surface en oxygène, un taux létal pour les micro-organismes», explique Petit, du laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (CNRS, université de Grenoble). Tant pis pour les rêves de vies étranges confinées depuis des millions d'années sous la glace. Qui, dans des discours made in Nasa et de quelques chercheurs américains, seraient analogues à des vies putatives sur Europe, la lune glacée de Jupiter.

Y a-t-il de la vie dans le lac Vostok ? De 1999 à mars 2002, la polémique fit rage entre équipes européennes et américaines. La question quittant la théorie en 1998, lorsque les foreurs russes remontèrent les dernières carottes de glace, un peu plus de cent mètres avant de toucher l'eau.

Kérosène. Peu après, l'équipe de Jean Jouzel, du laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, CEA-CNRS, démontrait que cette glace était formée par de l'eau du lac regelée. Très vite, une équipe américaine, qui partage avec Français et Russes les échantillons à analyser, annonce y avoir trouvé des bactéries. Le lac serait donc vivant ? Moins vite, une équipe franco-russe (Grenoble et Saint-Pétersbourg) démontre que les bactéries proviennent... du liquide de forage, un mélange à base de kérosène. Puis, en multipliant les précautions expérimentales pour éliminer les risques de contamination, découvre dans ses échantillons «quelques brins d'ADN par gramme, ce qui est minuscule», dixit Petit, provenant de bactéries connues pour vivre dans des eaux souterraines brûlantes (2). Comment sont-elles arrivées là, dans cette eau proche de 0 °C ?

Selon le scénario élaboré par l'équipe franco-russe, elles vivent sous plusieurs centaines de mètres de roches, dans des fissures, un milieu chaud en raison du flux thermique venu des profondeurs terrestres. Lors de séismes dont les scientifiques ont déniché la signature géochimique dans la glace, de violents jets de vapeur ou d'eau chaude ramonent ces fissures et projettent des bactéries jusque dans le lac. Elles y meurent, mais déposent dans l'eau leur ADN qui se retrouve ensuite dans la glace de regel. Celle qui contenait l'ADN bactérien s'est formée il y a 15 000 à 20 000 ans, lors du processus qui voit la glace, provenant de la neige tombée il y a des centaines de milliers d'années, fondre à une extrémité du lac et ce dernier regeler à l'autre extrémité. Ce renouvellement explique la concentration létale en oxygène du lac.

Précautions. Outre la double démonstration ­ le lac est stérile, il contient de l'ADN de bactéries provenant d'un autre lieu ­, le travail de l'équipe franco-russe attire l'attention des scientifiques sur un point crucial de la recherche de vie en milieu extrême ou extraterrestre : le très haut niveau de propreté exigé lors des expériences. Faute de quoi la plupart des découvertes porteront sur... la vie apportée par les instruments des expérimentateurs. Une leçon pour la Nasa et ses équipes. Et un avertissement aux médias. Avant de répercuter les annonces de découvreurs de vie extraordinaire, prier les scientifiques de détailler les extraordinaires précautions prises pour s'assurer qu'ils n'ont pas détecté une vie tout ce qu'il y a de plus ordinaire, apportée par leur propre matériel.

(1) Serguey Bulat et al., International Journal of Astrobiology, Cambridge University Press.

(2) Libération du 28 mai 2002

 

Il y a 10 000 ans, homme et  climat ont favorisé la disparition des grands mammifères

LE MONDE | 02.10.04 |

Il y a trente mille ans, les continents étaient encore peuplés de nombreux grands mammifères, qui s'étaient épanouis pendant le pléistocène. Cette période, qui s'est étendue entre 1,8 million d'années et 10 000 ans, a été marquée par plusieurs épisodes glaciaires et interglaciaires.

La "mégafaune", très diversifiée, comportait alors environ 150 genres d'animaux répartis sur tous les continents du globe.

Des mammouths, des mastodontes (cousins des mammouths), des paresseux, des machairodontes (félins à dents de sabre) et des castors géants peuplaient l'Amérique du Nord. D'étranges herbivores ressemblant à un croisement entre le cheval et le tapir parcouraient les plaines sud-américaines, raconte Anthony Stuart, professeur à University College (Londres), dans un numéro de Pour la science consacré à "La vie au temps des mammouths" (avril-juin 2004).

La faune australienne, quant à elle, était caractérisée par des marsupiaux et des kangourous géants à museau raccourci, de très gros oiseaux coureurs et l'énorme varan Megalania prisca (v. schéma),   dont le poids approchait la tonne. A la même époque, mammouths et rhinocéros laineux, cerfs géants et ours des cavernes côtoyaient les lions et les hyènes tachetées en Europe et en Asie septentrionale.

Mais, il y a dix mille ans, les deux tiers de cette faune ont disparu, et ce de manière inégale selon les continents. Pendant longtemps, on a supposé que l'homme était le principal responsable de cette extinction. Une hypothèse défendue par le paléontologue Paul Martin, de l'université de Tucson

(Arizona), qui postule qu'une chasse intense, une sorte de " guerre éclair", aurait contribué à la disparition de ces espèces en mille cinq cents ans, voire en cinq cents ans.

Sceptiques, d'autres chercheurs ont fait valoir que l'homme préhistorique, avec ses armes certes efficaces, mais primitives, ne pouvait avoir contribué seul à la disparition d'une si grande quantité d'espèces. De profonds changements climatiques et environnementaux survenus à partir de 21 000 ans, date du dernier maximum glaciaire, n'auraient-ils pas aussi joué un rôle ? A en croire les chercheurs, cet épisode glaciaire et le réchauffement de 10 °C qui a suivi pourraient être à l'origine du drame.

Une étude publiée dans la revue Science du 1er octobre et signée du paléobiologiste Anthony Barnosky (Muséums de paléontologie et de zoologie des vertébrés, université de Californie) et de plusieurs scientifiques américains, conclut au rôle conjoint de l'homme et du climat dans cette disparition massive. "Les données paléontologiques, climatologiques, archéologiques et écologiques dont nous disposons montrent que la chasse n'est pas en cause sur tous les continents, bien que les humains aient contribué à l'extinction sur certains d'entre eux. Il semble que l'intersection de l'impact humain avec des changements climatiques importants ait dirigé le rythme et la géographie de l'extinction dans l'hémisphère Nord." Dans l'hémisphère Sud, les données ne sont pas suffisantes pour trancher.

UNE LEÇON POUR L'AVENIR

Pour se faire une idée plus précise de la question, Anthony Barnosky et son équipe ont étudié la situation sur chaque continent. En Australie, les données sont éparses. Mais ils constatent qu'il y a eu peu de changements climatiques au moment de l'extinction animale, entre 50 000 et 40 000 ans. Cependant les hommes étaient déjà présents à ce moment-là sur l'île- continent, et certains scientifiques supposent que les feux qu'ils ont allumés ont davantage contribué à l'extinction que la chasse proprement dite.

En Europe, le réchauffement climatique vers 12 000 ans a frappé les animaux adaptés au froid, tels le rhinocéros et le mammouth laineux. Il est alors possible que l'expansion d'Homo sapiens sapiens – dont l'outillage et la nourriture étaient diversifiés – ait eu un impact négatif sur ces animaux. En Amérique du Nord, par contre, les humains ont accéléré le processus d'extinction enclenché par le climat. Les premières traces de chasse du mammouth correspondent en effet à la découverte des pointes de flèche en pierre taillée appartenant aux chasseurs de la culture Clovis (née il y a 11 400 ans, cette culture porte le nom de la ville du Nouveau-Mexique où ces armes furent décrites pour la première fois). Quinze siècles après l'apparition de cette culture, une grande partie des grands mammifères avait disparu du continent nord-américain. En Amérique du Sud, la situation n'est pas très claire. Mais il est possible que des incursions humaines combinées avec les changements climatiques coïncident avec la disparition de grands mammifères comme le lama et le tatou. En Afrique, il est difficile de trancher en faveur de l'homme ou du climat.  Tout cela inquiète Anthony Barnosky quant à l'avenir de la faune sauvage contemporaine. "Car, précise-t-il, les activités humaines combinées avec le changement climatique vont probablement conduire à des modifications de l'écosystème et à l'extinction inévitable de la plupart des espèces." En effet, "l'homme empiète de plus en plus sur les zones refuges des grands animaux sauvages, ce qui les empêchera de se redéployer géographiquement, comme dans le passé, pour faire face aux changements climatiques".

Christiane Galus

 

Grands singes : une nouvelle espèce en Afrique ?

Une espèce inconnue de primates se cache-t-elle dans la forêt de la République Démocratique du Congo, au centre du continent africain ? Un groupe de grands singes atypiques a été observé dans cette jungle par des habitants et par une primatologue, Shelly Williams, rapporte la BBC. Ces grands singes présenteraient à la fois des caractéristiques des gorilles et des chimpanzés.
Ils mesurent deux mètres de haut et vivent sur le sol, comme les gorilles. Cependant ils se trouvent à des centaines de kilomètres des populations de gorilles connues et leur menu ressemble à celui des chimpanzés, selon les informations de la chaîne britannique. Ces singes ont par ailleurs un comportement très agressif, relate Shelly Williams, qui a expérimenté un face-à-face peu rassurant.
D’autres études de terrains se préparent pour mieux observer et identifier ce groupe de primates avant que les trafiquants mettent la main dessus. Ils vivent dans une zone échappant au droit, soulignent les primatologues inquiets. D’ores et déjà, trois hypothèses sont retenues : soit il s’agit d’une nouvelle espèce, soit il s’agit de chimpanzés à la taille et au comportement atypique, soit ces singes sont issus d’un croisement entre gorilles et chimpanzés. A suivre.
C.D.  (11/10/04)

 Brève

Un cocotier au pôle Nord

 Enfouis à 400 mètres de profondeur, les sédiments marins extraits du forage ACEX (Arctic Coring Expedition) situé à quelques centaines de kilomètres du pôle Nord, ont révélé qu’il y a 55 millions d’années cette région bénéficiait d’un climat subtropical. Les scientifiques ont trouvé dans ces sédiments des microfossiles typiques des mers chaudes peu profondes.   Source : CNRS